LES PARTICULATITÉS DE LA PRATIQUE DE L'HARMOGUITARE
Juste pour rappel, car c'est la particularité principale qui le démarque du musicien jouant sur un chromatique : selon le morceau de musique que l'on veut interpréter, vu le non ou difficile accès au piston, il faut :
soit renoncer,
soit transposer dans une tonalité permettant d'annuler ou réduire drastiquement les altérations, avec si besoin et si ça ne choque pas l'oreille, un aménagement du style d'accompagnement,
soit combiner cette deuxième option en jouant sur un harmo d'une autre tonalité.
Ensuite – et je vous invite à regarder la fin de cette vidéo (au temps 2'30) postée sur un autre sujet par Sauveur le 17 juin dernier (et où le musicien joue de l'harmo à l'envers) – contrairement à l'harmoniciste qui déplace l'harmonica devant sa bouche, l'harmoguitariste doit déplacer sa tête devant un harmonica fixe !
https://www.youtube.com/watch?v=W-5kRGyoZso
En conséquence :
Il perd en rapidité d'exécution,
La distance de l'embouchure à ses lèvres varie : elle est plus courte au milieu de l'embouchure, mais les aigus et les graves sont plus éloignés ; ce qui est surtout contraignant pour les extrêmes graves qui réclament beaucoup plus de souffle (
versus d'aspiration).
Imaginez la difficulté avec un 16 trous !
Pour ma part, je pallie en insérant l'harmo légèrement de biais dans la pince du Flex Rack pour favoriser les graves.
On continue avec l'impossibilité de générer des effets avec les mains : jeu étouffé, trémolo, wouah wouah et autres modulations. Le son émis est donc quelque peu différent de celui entendu lorsque joué par un soliste ; c'est celui "brut d'harmo".
Cela dit, il reste le trémolo de souffle, le trémolo de gorge, le wouah wouah de bouche, bref toute modulation du flux d'air dans l'embouchure.
On poursuit avec la contrainte de ne pas bien voir le jeu de la main droite sur la guitare, contrairement à la gauche en haut du manche. Pas de souci pour les accords frappés ; mais par exemple en accompagnement de type "arpège", lorsque j'utilise un médiator pour renforcer le son, il m'arrive de ne pas "cliquer" sur la bonne corde.
Les improvisations, destinées à varier la mélodie répétitive en brodant dessus, sont forcément plus simplifiées et moins spectaculaire que ce que peut faire le soliste en multipliant les trilles au piston.
La pratique de l'harmoguitare est plus ardue qu'elle n'y parait. Si l'interprétation de morceaux faciles avec des accords simples est aisée, elle devient "casse-gueule" (= canardeuse) lorsque, soit la mélodie est délicate à jouer, soit l'accompagnement est particulièrement sophistiqué. En effet, en particulier pour un homme, il est bien difficile de se concentrer simultanément sur deux choses différentes. En cas de difficulté pour aboutir à un résultat acceptable, il faudra envisager de "simplifier", soit la mélodie (pas évident car c'est quand même l'essence même du morceau), soit l'accompagnement, et donc certaines de ses nuances qui conféreraient un aspect plus pro à l'interprétation.
Mais dans les particularités positives, pouvoir se suffire à soi-même pour interpréter un morceau de musique, que ce soit chez soi ou pour mettre de l'ambiance au sein d'un groupe d'amis ou familial, apporte bien des satisfactions.
Qui plus est, elle laisse une totale liberté de raccourcir ou rallonger une interprétation en fonction des circonstances, d'en varier le jeu selon l'humeur du moment, de moduler la vitesse du tempo (ex : ralentissements passagers du phrasé), etc., sans être tributaire de la rigidité d'un playback.
Cette liste n'est pas exhaustive. Si d'autres particularités me venaient à l'esprit, j'éditerai cette intervention.